Séverine

Vandenhende

-61kg et -63kg

Dans le creux de la vague après son magnifique titre mondial de 1997, Séverine Vandenhende fut exacte au rendez-vous de Sydney 2000.

« On a souvent vu des gens très talentueux passer à côté de choses superbes et je sais que, si je ne veux pas que cela m’arrive, il me faut travailler. » Dans la bouche de Séverine Vandenhende en début d’année 1999, cette phrase sonne comme un garde-fou personnel. Pourtant, en octobre 1997 à Bercy, elle a éclaboussé la concurrence par son judo volontaire et agressif. Débarrassée de la tutelle de Cathy Fleury, en retraite après les Jeux d’Atlanta, la Nordiste sait que c’est son tour et qu’elle ne doit pas laisser passer le train. Ses premiers championnats d’Europe, en 1994 pendant l’année sabbatique prise par sa glorieuse aînée, se sont soldés par une défaite au premier tour.
Trois ans de frein rongé plus tard, sa deuxième cartouche fait long feu elle aussi aux Europe d’Ostende, avec un revers en quarts face à Irena Tokarz, mais qu’elle retrouve finalement à ses côtés sur la troisième marche du podium en remontant les repêchages à coup de ippons. Le couperet n’est pas passé loin pour « Waddle » – surnom à la fois hérité de sa passion du football et de sa coupe de cheveux. Elle le sait et voit en ces championnats du monde à domicile l’occasion parfaite pour rectifier le tir. Physiquement au point, ça passe à la décision contre la Japonaise Hiroko Kitazume, qui l’avait dominée à Coubertin en début d’année. L’Espagnole Sara Alvarez succombe à son te-guruma rageur. Il lui reste à passer sur le corps de la légende naissante Gella Vandecaveye, déjà sur tous les podiums qui comptent et pour la troisième fois sacrée championne d’Europe quelques mois plus tôt. La Belge marque la première, mais s’envole sur le ura-nage de la Française, qui fait chavirer de bonheur Bercy et s’imprimera à jamais dans la rétine de tous ceux qui étaient là.

Le plaisir retrouvé au bout du tunnel

Couronnée reine du monde à tout juste vingt-trois ans, avec deux petits mois d’avance sur les temps de passage de Cathy Fleury, tout va bien pour Séverine. Sa route semble tracée jusqu’aux Jeux de Sydney. Il n’en est rien. C’est généralement l’inverse, mais cette fois c’est la catégorie qui a gonflé de deux kilos durant l’hiver, passant de -61kg à -63kg. Vandecaveye et Alvarez prennent leur revanche au tournoi de Paris et aux championnats d’Europe, avant qu’une première blessure à l’épaule ne l’éloigne des dojos. Le ligament latéral externe de son genou gauche repousse son retour, laissant jusqu’au bout planer le doute sur la défense de son titre aux mondiaux de Birmingham en 1999. Elle en sera, avec deux semaines de judo comme repère, pour la « pire honte » de sa vie : une disqualification sur… vomissement, qui la freine encore un peu plus dans la course au quota olympique. L’envie de tout plaquer se fait forte. « J’y ai pensé plusieurs fois. Jusqu’en janvier (2000, NDLR), j’étais au plus bas. Mais j’ai travaillé dur et j’ai repris goût au judo. » Finie la Séverine Vandenhende sur le talent, place désormais à la besogneuse. Les mots de Cécile Nowak-Grasso, nouvelle entraîneure nationale, trouvent leur écho. La mission commando pour l’Australie est lancée par du bronze à Moscou, avant l’argent de Paris, Rome et aux championnats d’Europe de Wroclaw. Pas d’or… mais le plaisir de cette instinctive est bien de retour.
La souffrance de la préparation estivale ne l’atteint pas. C’est avec sérénité qu’elle traverse le globe pour disputer le tournoi de sa vie. Elle n’est pas championne d’Europe et n’a pas gagné de très grands tournois, mais elle a été championne du monde. L’enjeu la rend plus forte et elle le sait. « En me présentant sur chaque combat, je me remémorais tout ce que j’avais fait pour me dire que j’étais prête. » La championne du monde 1995 et médaillée d’Atlanta Jung Sung-Sook sera la première à constater les dégâts, rejointe par la Canadienne Sophie Roberge, l’Américaine Celita Schultz et l’Allemande vice championne du monde 1997 en -66kg Anja von Rekowski, impuissantes devant l’impact d’une athlète retrouvée. Ultime obstacle du jour, la Chinoise Li Shufang résiste jusqu’au bout, menant au jeu des pénalités. « Je savais que ça allait être un combat dur, et j’étais armée pour ne rien lâcher, même s’il avait duré des heures… » L’arbitre inverse la tendance à une poignée de secondes du gong, sanctionnant une deuxième fois l’Asiatique pour non combativité. « En regardant le chronomètre, j’ai su qu’elle ne me toucherait plus et que le titre était pour moi. » Sans le savoir encore, la faute à ce même genou gauche qui la privera des mondiaux 2001 avant de la pousser vers la retraite à vingt-neuf ans, Séverine Vandenhende vient de vivre l’apogée d’une carrière, fulgurante comme son uchi-mata.

Les grands héros
passent toujours par l’enfer

L’année 1997 doit être le point d’orgue de sa carrière, un championnat du monde à Paris. Mais le champion, dont la notoriété extraordinaire échappe à la sphère du sport et qui est même désigné par deux fois « Français préféré des Français », a-t-il encore la motivation de se battre ? Pied de nez d’un destin trop bien maîtrisé jusque-là, c’est une chute à moto, qui le blesse gravement à l’épaule et au mollet, qui va la lui rendre

Alors que les prévisions sont pessimistes, il revient sur le tapis à une vitesse extraordinaire et trouve les ressources, devant son public, pour arracher ce titre très important au géant chinois Pan Song, un colosse de plus de deux mètres qui l’épuise en quart de finale, au terrible Turc Tataroglu, qui ne cesse de vouloir l’arracher en demi-finale, et enfin à Shinohara, désormais titulaire, qu’il domine laborieusement aux pénalités en finale. Un quatrième couronnement mondial qui est celui du refus de se soumettre. Les grands héros passent toujours par l’enfer. Éprouvé physiquement, celui qui est alors le plus grand champion de l’histoire du judo français, se découvre un nouvel adversaire : son dos. Et Douillet disparaît. Pas de coupe du monde des nations en 1998, pas même de championnats du monde 1999 où, un temps attendu, il doit déclarer forfait. Pourtant, il lui en reste une. Ce sera la plus belle, les Jeux de Sydney, en 2000. Il l’a pleinement compris lui-même et s’épanouit comme un phénix. Sa défaite en finale des championnats d’Europe, l’année suivante, contre le formidable Géorgien David Khakhaleishvili, qui a emporté le titre olympique en dominant le Japonais Ogawa, est sa dernière défaite significative. Quelques mois plus tard, il est champion du monde pour la première fois – et c’est aussi une première française dans cette catégorie des poids lourds – devant le monstre polonais Kubacki qui restait sur deux victoires contre lui, devant le Géorgien en finale, qui assure la passation d’un simple pouce levé, alors qu’il reste six secondes au compteur.
En 1999, comme un défi, Shinichi Shinohara a lui aussi réussi l’exploit d’emporter les deux titres mondiaux. Il vient à Sydney en maître, avec le jeune Russe Tamerlan Tmenov comme challenger. Douillet ? On ne l’a pas vu depuis trois ans sur un tapis de compétition. Pourtant, il annonce son retour et même ses compétitions de reprise poussives, dont une cinquième place aux championnats d’Europe de Bratislava, ne lui ôtent pas son sourire. L’invincible est tellement loin d’être favori que même le clan français doute de l’idée. Tout le monde semble penser que David Douillet « a tout à perdre », sauf lui, dont la motivation tourne autour du plaisir de faire encore une fois ce qu’il sait si bien faire. Et le miracle a lieu. Accueilli comme le roi de retour d’exil, y compris par ses adversaires avec lesquels il a de longs échanges à chaque fin de combat, il passe tour après tour. Le Turc Tataroglu, le Belge Harry Van Barneveld, l’Estonien Peterlson – qui a la réputation de ne pas avoir perdu depuis plus d’un an contre un droitier et qui s’envole en quelques secondes sur son uchi-mata. Enfin, c’est la finale. Douillet irradie, Shinohara sombre. Le combat marquera l’époque, notamment pour une séquence impossible à arbitrer qui alimentera les conversations pendant des années (lire par ailleurs). Ce sera le dernier combat de David Douillet. Dévasté, Shinohara, lui, ne s’en remettra jamais. Éprouvé physiquement, celui qui est alors le plus grand champion de l’histoire du judo français, se découvre un nouvel adversaire : son dos. Et Douillet disparaît. Pas de coupe du monde des nations en 1998, pas même de championnats du monde 1999 où, un temps attendu, il doit déclarer forfait. Pourtant, il lui en reste une. Ce sera la plus belle, les Jeux de Sydney, en 2000. Il l’a pleinement compris lui-même et s’épanouit comme un phénix. Sa défaite en finale des championnats d’Europe, l’année suivante, contre le formidable Géorgien David Khakhaleishvili, qui a emporté le titre olympique en dominant le Japonais Ogawa, est sa dernière défaite significative. Quelques mois plus tard, il est champion du monde pour la première fois – et c’est aussi une première française dans cette catégorie des poids lourds – devant le monstre polonais Kubacki qui restait sur deux victoires contre lui, devant le Géorgien en finale, qui assure la passation d’un simple pouce levé, alors qu’il reste six secondes au compteur.

Les grands héros
passent toujours par l’enfer

D’abord vainqueur de David Douillet sur uchi-mata lors de leur première rencontre, au tournoi de Paris 1995, Shinichi Shinohara perd contre lui en finale des championnats du monde 1997, d’une pénalité. À Sydney, en 2000, le Japonais est double champion du monde en titre, tandis que le héros français est perdu de vue depuis trois ans. Mais c’est lui qui se montre fébrile toute la journée, tandis que le Français semble au contraire de plus en plus à son aise. En finale, la première prise de garde donne le ton : le Japonais baisse la tête, l’autorité est du côté du champion olympique en titre. Mais Shinichi Shinohara a décidé depuis longtemps de tout jouer sur un contre de uchi-mata dont il a le secret.
Sûr de lui, Douillet lance sa technique de jambe, c’est le bon moment pour le Nippon qui tente de surpasser ! L’attaque est forte, il lâche sa saisie, tombe sur le côté tandis que l’élan emporte le Français sur le dos. C’est la confusion ! L’arbitre central et les deux arbitres de coin annoncent trois marques différentes, dont un ippon contre Douillet. C’est finalement le Japonais qui est sanctionné d’un yuko pour sa chute dans une atmosphère d’émotion générale qui voit le chef de délégation japonais, l’illustre Yasuhiro Yamashita, courir vers la table officielle pour porter réclamation. La marque est finalement maintenue, mais, comme pour compenser, Douillet est pénalisé deux fois rapidement, ce qui ramène les deux adversaires à égalité. C’est fini déjà. Le Japonais a donné tout ce qu’il avait et rien n’entame la confiance du Français. Une nouvelle attaque lui donnera finalement la victoire.

Ce qui différencie
les grands champion

« Il y avait une opposition terrible à l’époque, notamment à l’international. J’avais bien écouté Jean-Luc Rougé dire : les champions de France, on en a tous les ans. Ce qu’il nous faut, ce sont des combattants qui peuvent battre les étrangers. Je me suis concentré là-dessus et c’est peut-être ce qui a fait la différence. Quand j’ai commencé à battre des gars forts, comme l’ancien champion du monde coréen Cho, ou le vice-champion du monde géorgien Kiborozalidze, ou même quand je perds de peu sur Ogawa lors de la coupe Kano, au Japon, en 1990, alors qu’il était encore intouchable, j’ai compris que si je parvenais à le faire sur un championnat complet, je serai champion. Teddy ? Cela ne sert à rien de nous comparer. Il n’y avait des championnats du monde que tous les deux ans, et j’étais loin d’être le combattant le plus puissant de ma génération comme lui. Quand je le vois, je suis fier pour la France, parce qu’il est le produit d’une école, et je me dis que j’ai peut-être défriché le terrain pour lui et ça me fait plaisir. Si l’on doit chercher des points communs, c’est dans la dimension mentale. C’est elle qui prédomine chez les grands champions, ceux qui sont capables de gagner plusieurs fois. »

David Douillet

Fiche d'identité

Date de naissance

05/09/1996 (27 ans)

Lieu de Naissance

Paris

Taille

1m79

Catégorie

+95kg et +100kg

Niveau

8e dan depuis 2020

Techniques favorites

ko-uchi-gari
et o-uchi-gari

Clubs précédents

EPPG Judo ; Racing Club de France ; Judo Club Chilly Mazarin-Mazarin Morangi

Palmarès

COMPÉTITIONS
JEUX
OLYMPIQUES
2
0
1
CHAMPIONNATS DU MONDE
4
0
0
CHAMPIONNATS D'EUROPE
1
1
2
Championnats de France
2
1
1
Championnats d’Europe juniors
0
0
1
2000
JEUX OLYMPIQUES
MÉDAILLE D'OR
+100KG
1999
Championnats d'Europe
MÉDAILLE D'OR
Toutes catégories
1997
Championnats du monde
MÉDAILLE D'OR
+95 kg
1996
JEUX OLYMPIQUES
MÉDAILLE D'OR
+95 kg
1995
Championnats du monde
MÉDAILLE D'OR
+95 kg
1994
Championnats d'europe
MÉDAILLE D'OR
+95 kg
1993
Championnats dumonde
MÉDAILLE D'OR
+95 kg
1993
Championnats d'Europe
MÉDAILLE D'ARGENT
+95 kg
1992
Championnats d'Europe
MÉDAILLE DE BRONZE
+95 kg
1992
JEUX OLYMPIQUES
MÉDAILLE DE BRONZE
+95 kg
1992
Championnats d'Europe
MÉDAILLE DE BRONZE
+95 kg