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du judo →

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Le judo en compétition →

Chapitre 5

Le France, grande nation du judo mondial →

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Le Judo aux JOP →

David

Douillet

+95kg et +100kg

David Douillet reste à jamais pour le judo français l’unique double champion du monde sur le même championnat et notre premier double champion olympique. Une histoire héroïque.

Douillet vs Barneveld - Atlanta 1996
© Presse Sports
Qui a perçu le premier, chez ce David normand, grand garçon un peu pataud aux joues rondes et à la frange raide, le monstre à venir, un Goliath qui allait devenir le plus grand compétiteur de l’histoire de notre judo, futur ministre, et un temps l’homme préféré de tous les Français ? Son professeur de Neufchâtel-en-Bray, Jacques Lemaître peut-être, confronté qu’il était à un pré-ado timide de onze ans, mais culminant déjà à un mètre quatre-vingts pour quatre-vingts kilos. Quand il est jeune junior, rien ne le désigne au milieu des prétendants. René Rambier, responsable des équipes de France de l’époque, ne s’y trompe cependant pas. Malgré la victoire au tournoi de Paris 1989 de Laurent Del Colombo, c’est un combattant de la nouvelle génération qui lui a tapé dans l’œil :

Je retiens surtout le parcours de David Douillet. Il manque encore un peu de puissance, mais il est agressif, combatif, fort techniquement et psychologiquement. Douillet est notre véritable espoir pour Barcelone, car je pense qu’en 1992, il sera plus fort que Del Colombo.

René Rambier

Le Normand apprend vite. Il s’empare de deux titres nationaux seniors (en 1991 et 1992) et, malgré l’opposition acharnée des rivaux de sa génération – le musculeux Patrice Rognon, médaillé européen en Open en 1991, et surtout le monumental Georges Mathonnet qui obtient une médaille en Open lors de leur premier championnat du monde en 1991, c’est lui qui est choisi, à vingt-trois ans, pour défendre les chances de la France aux Jeux olympiques de Barcelone en 1992. Ce sera comme une évidence. Même si le quadruple champion du monde japonais Naoya Ogawa le domine, sa façon de monter à l’assaut du donjon cubain Frank Moreno-Garcia pour le bronze a valeur de démonstration. David Douillet est fait pour les grands combats. Il l’a pleinement compris lui-même et s’épanouit comme un phénix. Sa défaite en finale des championnats d’Europe, l’année suivante, contre le formidable Géorgien David Khakhaleishvili, qui a emporté le titre olympique en dominant le Japonais Ogawa, est sa dernière défaite significative. Quelques mois plus tard, il est champion du monde pour la première fois – et c’est aussi une première française dans cette catégorie des poids lourds – devant le monstre polonais Kubacki qui restait sur deux victoires contre lui, devant le Géorgien en finale, qui assure la passation d’un simple pouce levé, alors qu’il reste six secondes au compteur.

Duel avec Shinohara

Sacré champion d’Europe en 1994, David Douillet sait déjà se faire rare, une stratégie qu’il emprunte à son idole, le lourd japonais Yasuhiro Yamashita. 1995, le tournoi de Paris servira de préparation. Le champion du monde français bat Ogawa, mais s’incline en finale face à un nouveau venu à la physionomie étrange, le poids lourd japonais Shinichi Shinohara. Aucun des deux ne se doute alors qu’il vient d’entamer un duel formidable, et Shinohara ne sait pas, alors qu’il savoure cette victoire sur le champion français, que c’est la première et dernière fois qu’il l’emporte contre lui. David Douillet s’offre un défi à sa mesure : viser les deux médailles d’or des championnats du monde de Chiba au Japon, à la fois en +95kg et en toutes catégories, exploit rare. Le premier jour est une formalité, avec une victoire par fauchage intérieur contre l’Allemand Moller dans une finale que le Japonais Ogawa n’est pas parvenu à atteindre. Souverain quelques jours plus tard, le Français ne tremble qu’une fois, en finale, mené d’une pénalité par le dangereux Russe Kossorotov, champion du monde 1991… immédiatement balayé par Douillet qui ne tolère rien de ses adversaires, pas même de le faire douter.
Atlanta 1996 - Presse Sports
Il est à pied d’œuvre pour ses deuxièmes Jeux, à Atlanta, en 1996. Cette fois, il est le « patron », le champion invincible. Il n’a fait qu’un tournoi de préparation, la modeste « world cup » de Rome. C’est Ogawa encore, qui a été choisi pour effacer l’affront que représente cette montée en puissance. Les « lourds », c’est l’affaire du Japon… Malgré son talent formidable – David Douillet dira toujours que c’était son adversaire japonais le plus dangereux techniquement – et une excellente préparation, il est mystifié par le leader français d’un petit « coup de patte » en début de combat. En finale, c’est un outsider espagnol, Ernesto Perez, qui se retrouve face à « ouillet », comme on peut le lire en lettres rouges sur le judogi blanc. Déjà bien heureux d’être là, il ne fait guère obstacle à la victoire attendue du Français. Tout est accompli pour notre Goliath. Triple champion du monde, le voilà champion olympique, à vingt-sept ans. Paradoxalement, c’est à ce moment-là peut-être que sa carrière prend une dimension encore supérieure, moins par les réalisations qu’il lui reste à accomplir que par la façon dont il y parvient. Il l’a pleinement compris lui-même et s’épanouit comme un phénix. Sa défaite en finale des championnats d’Europe, l’année suivante, contre le formidable Géorgien David Khakhaleishvili, qui a emporté le titre olympique en dominant le Japonais Ogawa, est sa dernière défaite significative. Quelques mois plus tard, il est champion du monde pour la première fois – et c’est aussi une première française dans cette catégorie des poids lourds – devant le monstre polonais Kubacki qui restait sur deux victoires contre lui, devant le Géorgien en finale, qui assure la passation d’un simple pouce levé, alors qu’il reste six secondes au compteur.

Les grands héros
passent toujours par l’enfer

L’année 1997 doit être le point d’orgue de sa carrière, un championnat du monde à Paris. Mais le champion, dont la notoriété extraordinaire échappe à la sphère du sport et qui est même désigné par deux fois « Français préféré des Français », a-t-il encore la motivation de se battre ? Pied de nez d’un destin trop bien maîtrisé jusque-là, c’est une chute à moto, qui le blesse gravement à l’épaule et au mollet, qui va la lui rendre

Alors que les prévisions sont pessimistes, il revient sur le tapis à une vitesse extraordinaire et trouve les ressources, devant son public, pour arracher ce titre très important au géant chinois Pan Song, un colosse de plus de deux mètres qui l’épuise en quart de finale, au terrible Turc Tataroglu, qui ne cesse de vouloir l’arracher en demi-finale, et enfin à Shinohara, désormais titulaire, qu’il domine laborieusement aux pénalités en finale. Un quatrième couronnement mondial qui est celui du refus de se soumettre. Les grands héros passent toujours par l’enfer. Éprouvé physiquement, celui qui est alors le plus grand champion de l’histoire du judo français, se découvre un nouvel adversaire : son dos. Et Douillet disparaît. Pas de coupe du monde des nations en 1998, pas même de championnats du monde 1999 où, un temps attendu, il doit déclarer forfait. Pourtant, il lui en reste une. Ce sera la plus belle, les Jeux de Sydney, en 2000. Il l’a pleinement compris lui-même et s’épanouit comme un phénix. Sa défaite en finale des championnats d’Europe, l’année suivante, contre le formidable Géorgien David Khakhaleishvili, qui a emporté le titre olympique en dominant le Japonais Ogawa, est sa dernière défaite significative. Quelques mois plus tard, il est champion du monde pour la première fois – et c’est aussi une première française dans cette catégorie des poids lourds – devant le monstre polonais Kubacki qui restait sur deux victoires contre lui, devant le Géorgien en finale, qui assure la passation d’un simple pouce levé, alors qu’il reste six secondes au compteur.
Atlanta 1996 © Presse Sports
Atlanta 1996 © Presse Sports
En 1999, comme un défi, Shinichi Shinohara a lui aussi réussi l’exploit d’emporter les deux titres mondiaux. Il vient à Sydney en maître, avec le jeune Russe Tamerlan Tmenov comme challenger. Douillet ? On ne l’a pas vu depuis trois ans sur un tapis de compétition. Pourtant, il annonce son retour et même ses compétitions de reprise poussives, dont une cinquième place aux championnats d’Europe de Bratislava, ne lui ôtent pas son sourire. L’invincible est tellement loin d’être favori que même le clan français doute de l’idée. Tout le monde semble penser que David Douillet « a tout à perdre », sauf lui, dont la motivation tourne autour du plaisir de faire encore une fois ce qu’il sait si bien faire. Et le miracle a lieu. Accueilli comme le roi de retour d’exil, y compris par ses adversaires avec lesquels il a de longs échanges à chaque fin de combat, il passe tour après tour. Le Turc Tataroglu, le Belge Harry Van Barneveld, l’Estonien Peterlson – qui a la réputation de ne pas avoir perdu depuis plus d’un an contre un droitier et qui s’envole en quelques secondes sur son uchi-mata. Enfin, c’est la finale. Douillet irradie, Shinohara sombre. Le combat marquera l’époque, notamment pour une séquence impossible à arbitrer qui alimentera les conversations pendant des années (lire par ailleurs). Ce sera le dernier combat de David Douillet. Dévasté, Shinohara, lui, ne s’en remettra jamais. Éprouvé physiquement, celui qui est alors le plus grand champion de l’histoire du judo français, se découvre un nouvel adversaire : son dos. Et Douillet disparaît. Pas de coupe du monde des nations en 1998, pas même de championnats du monde 1999 où, un temps attendu, il doit déclarer forfait. Pourtant, il lui en reste une. Ce sera la plus belle, les Jeux de Sydney, en 2000. Il l’a pleinement compris lui-même et s’épanouit comme un phénix. Sa défaite en finale des championnats d’Europe, l’année suivante, contre le formidable Géorgien David Khakhaleishvili, qui a emporté le titre olympique en dominant le Japonais Ogawa, est sa dernière défaite significative. Quelques mois plus tard, il est champion du monde pour la première fois – et c’est aussi une première française dans cette catégorie des poids lourds – devant le monstre polonais Kubacki qui restait sur deux victoires contre lui, devant le Géorgien en finale, qui assure la passation d’un simple pouce levé, alors qu’il reste six secondes au compteur.

Duel épique,
finale de légende

D’abord vainqueur de David Douillet sur uchi-mata lors de leur première rencontre, au tournoi de Paris 1995, Shinichi Shinohara perd contre lui en finale des championnats du monde 1997, d’une pénalité. À Sydney, en 2000, le Japonais est double champion du monde en titre, tandis que le héros français est perdu de vue depuis trois ans. Mais c’est lui qui se montre fébrile toute la journée, tandis que le Français semble au contraire de plus en plus à son aise. En finale, la première prise de garde donne le ton : le Japonais baisse la tête, l’autorité est du côté du champion olympique en titre. Mais Shinichi Shinohara a décidé depuis longtemps de tout jouer sur un contre de uchi-mata dont il a le secret.
David Douillet vs Shinichi Shinohara - Sidney 2000
© Presse Sports
Sûr de lui, Douillet lance sa technique de jambe, c’est le bon moment pour le Nippon qui tente de surpasser ! L’attaque est forte, il lâche sa saisie, tombe sur le côté tandis que l’élan emporte le Français sur le dos. C’est la confusion ! L’arbitre central et les deux arbitres de coin annoncent trois marques différentes, dont un ippon contre Douillet. C’est finalement le Japonais qui est sanctionné d’un yuko pour sa chute dans une atmosphère d’émotion générale qui voit le chef de délégation japonais, l’illustre Yasuhiro Yamashita, courir vers la table officielle pour porter réclamation. La marque est finalement maintenue, mais, comme pour compenser, Douillet est pénalisé deux fois rapidement, ce qui ramène les deux adversaires à égalité. C’est fini déjà. Le Japonais a donné tout ce qu’il avait et rien n’entame la confiance du Français. Une nouvelle attaque lui donnera finalement la victoire.

Ce qui différencie
les grands champions

« Il y avait une opposition terrible à l’époque, notamment à l’international. J’avais bien écouté Jean-Luc Rougé dire : les champions de France, on en a tous les ans. Ce qu’il nous faut, ce sont des combattants qui peuvent battre les étrangers. Je me suis concentré là-dessus et c’est peut-être ce qui a fait la différence. Quand j’ai commencé à battre des gars forts, comme l’ancien champion du monde coréen Cho, ou le vice-champion du monde géorgien Kiborozalidze, ou même quand je perds de peu sur Ogawa lors de la coupe Kano, au Japon, en 1990, alors qu’il était encore intouchable, j’ai compris que si je parvenais à le faire sur un championnat complet, je serai champion. Teddy ? Cela ne sert à rien de nous comparer. Il n’y avait des championnats du monde que tous les deux ans, et j’étais loin d’être le combattant le plus puissant de ma génération comme lui. Quand je le vois, je suis fier pour la France, parce qu’il est le produit d’une école, et je me dis que j’ai peut-être défriché le terrain pour lui et ça me fait plaisir. Si l’on doit chercher des points communs, c’est dans la dimension mentale. C’est elle qui prédomine chez les grands champions, ceux qui sont capables de gagner plusieurs fois. »

David Douillet

Sydney 2000 © Presse Sports
Sidney 2000 © Presse Sports

Fiche d'identité

Date de naissance

17/02/1969

Lieu de Naissance

Rouen

Taille

1m96

Catégorie

+95kg et +100kg

Niveau

8e dan depuis 2020

Techniques favorites

uchi-mata, o-uchi-gari
et harai goshi

Clubs précédents

CSB Neufchâtel-en-Bray, JC Maisons-Alfort, Paris Saint-Germain Judo

Atlanta 1996 © Presse Sports

Palmarès

COMPÉTITIONS
JEUX
OLYMPIQUES
2
0
1
CHAMPIONNATS DU MONDE
4
0
0
CHAMPIONNATS D'EUROPE
1
1
2
Championnats de France
2
1
1
Championnats d’Europe juniors
0
0
1
Douillet vs Perez - Atlanta 1996 © AFP
2000
JEUX OLYMPIQUES
MÉDAILLE D'OR
+100KG
1999
Championnats d'Europe
MÉDAILLE D'OR
Toutes catégories
1997
Championnats du monde
MÉDAILLE D'OR
+95 kg
1996
JEUX OLYMPIQUES
MÉDAILLE D'OR
+95 kg
1995
Championnats du monde
MÉDAILLE D'OR
+95 kg
1994
Championnats d'europe
MÉDAILLE D'OR
+95 kg
1993
Championnats du monde
MÉDAILLE D'OR
+95 kg
1993
Championnats d'Europe
MÉDAILLE D'ARGENT
+95 kg
1992
Championnats d'Europe
MÉDAILLE DE BRONZE
+95 kg
1992
JEUX OLYMPIQUES
MÉDAILLE DE BRONZE
+95 kg
1992
Championnats d'Europe
MÉDAILLE DE BRONZE
+95 kg