Une croissance
inédite
Comment le judo français est-il passé de quelques dizaines de curieux au demi-million de pratiquants en l’espace de soixante ans ?
Si les raisons sont multifactorielles, l’élan est quoi qu’il en soit irrésistible depuis que Mikinosuke Kawaishi est descendu du train Gare du Nord, en provenance de l’Angleterre, le 1er octobre 1935. Dans le sillage de sa méthode, occidentalisée pour mieux convenir aux Européens avec une classification numérotée des techniques pour plus de facilité d’apprentissage et l’intégration de l’idée des ceintures de couleurs, venue d’Angleterre, pour clarifier la montée en compétences nécessaire, encourager à la progression, jusqu’à l’obtention de la ceinture noire. Ses premiers élèves vont constituer le socle solide de la diffusion réussie de l’activité. La seconde Guerre Mondiale ne saura que la freiner – le sport devenant l’un des rares espaces de liberté sous Vichy, avant un premier boom consécutif à la fin du conflit planétaire qui aboutit à la prise d’indépendance de la section judo-jiu-jitsu de la fédération française de lutte pour devenir, le 5 décembre 1946, la fédération française de judo-jiu-jitsu (FFJJJ). Paul Bonét-Maury, ceinture noire n°2 dans la liste du futur Collège des Ceintures Noires, en devient le premier président.
Les 30 Glorieuses,
période propice

Les champions
sur le devant de la scène
Si les premiers championnats du monde ne sont organisés qu’en 1956 à Tokyo – avec du bronze pour le Français Henri Courtine – la compétition est déjà bien installée dans le paysage hexagonal. Les premiers championnats de France remontent en effet au 30 mai 1943, organisés dans la salle Wagram à Paris devant plusieurs milliers de spectateurs. Les rencontres internationales – essentiellement face à l’Angleterre jusqu’au début des années 1950 sous forme de tournois par équipes – préfigurent les premiers championnats d’Europe, qui se tiennent les 5 et 6 décembre 1951 au Vélodrome d’Hiver de Paris. Des grands galas sont organisés dans la foulée pour entretenir la dynamique. Pionnière de l’organisation, la France brille également sur les tatamis, empochant dix-huit des vingt-six premiers titres continentaux décernés entre 1951 et 1955. Pas de médaille en revanche pour le clan tricolore lors des troisièmes championnats du monde, organisés à Paris en 1961 (pour la première fois hors du Japon), qui voient toutefois tous les grands médias nationaux s’intéresser au judo et relayer l’événement à la télévision avec le journaliste vedette Léon Zitrone aux commentaires et dans les journaux.
Les dojos
s’ouvrent à la jeunesse


33%
des licenciés de 1958 (11 000 sur 30 000) avaient moins de dix-huit ans
75%
des licenciés de 1969 (118 000 sur 157 000) avaient moins de dix-huit ans
Un code moral
pour l’éternité
Politesse
Courage
C’est faire ce qui est juste
Sincérité
Honneur
Modestie
Respect
Contrôle de soi
Amitié
C’est le plus sur des sentiments humains
Ces huit valeurs infusent depuis bientôt quarante ans des générations de judokas, privilégiés – parfois sans le savoir – d’être nourris à longueur d’entraînements par cette vision du monde positive et saine qui en font des citoyens éclairés. De l’extérieur, c’est aussi ce code moral qui contribue largement à l’image positive dont bénéficie le judo depuis ses débuts en France.